Fonctions et préservation

Les tourbières remplissent une multitudes de fonctions essentielles.

Un réservoir de biodiversité.

Les conditions de vie dans les tourbières sont rudes. L’humidité permanente, l’acidité et la pauvreté du sol, la faible minéralisation, les températures moyennes basses, rendent très contraignant le milieu des tourbières. Elles abritent donc des systèmes présents nulle part ailleurs. Comme les tourbières sont en fortes régression, les espèces, animales ou végétales, qui y vivent sont de plus en plus rares ou menacées.

Un régulateur climatique et un purificateur d’eau.

Les tourbières, et les zones humides en général, participent à la régulation des conditions climatiques locales en réduisant, par le phénomène d’évaporation, les périodes de sècheresses et d’’échauffement. Elles assurent également un rôle de filtration et d’épuration leur permettant de restituer dans l’environnement une eau de grande qualité.

Un outil scientifique et archéologique

La tourbe fossilise parfaitement tous les organismes qui y sont emprisonnés, tels que les pollens, les spores, et même les restes d’hommes ou d’animaux. Comme les couches peuvent être datées, on peut obtenir à partir des pollens (palynologie) des informations sur la végétation présente à une époque donnée, et donc sur le climat. Par ailleurs, la bonne conservation d’objets d’origine humaine (tissus, barques, chariots….) fournit de véritables trésors archéologiques.

L'homme de Tollund

En ce samedi 6 mai 1950, les frères Emil et Viggo Højgaard, accompagnés de l’épouse de ce dernier, Grethe, sont au travail dans une tourbière danoise de Bjældskovdal, Soudain, alors qu’elle transporte de la tourbe, Gretha voit affleurer un objet. Après un début de dégagement de celui-ci, une macabre surprise attend les Højgaard sous la forme d’une tête humaine au visage noirci mais étonnamment bien conservée. Si bien conservée que le trio croit, malgré l’enfouissement profond dans une tourbière millénaire, à un meurtre récent. Une hypothèse que semble accréditer la corde passée au cou de l’homme. Toutefois,: le cadavre ayant été découvert à environ 2,5 mètres du sol, il ne peut en aucun cas s’agir d’une personne récemment décédée.

Le dégagement  du cadavre laisse apparaître le corps entièrement momifié d’un homme replié sur lui-même dans la position d’un foetus. Curieusement, le corps est nu, à l’exception d’une ceinture de cuir de bœuf nouée à la taille et, sur la tête, d’une sorte de bonnet, fait de huit pièces de cuir de brebis cousues. La dépouille est transférée au Musée National de Copenhague afin que puissent commencer la datation du corps.

C’est ainsi que « l’homme de Tollund » est soumis, à une série d’examens dignes d’une série policière sous la direction des plus éminents spécialistes : radiographies, relevé des empreintes digitales, datation au carbone 14, endoscopie, relevés dentaires,…. Mais c’est véritablement à partir de novembre 2002 que l’enquête progresse de la manière la plus spectaculaire. À cette date est en effet réalisée l’autopsie des organes internes au moyen de milliers de clichés de scanner.

Des sacrifices humains

L’exceptionnelle conservation du corps résulte de l’action conjointe des sphaignes, de  l’absence d’oxygène et du froid ambiant dans le Jutland. « L’homme de Tollund » a vécu durant l’Age du Fer, soit environ il y 2 400 ans ! Il a vraisemblablement été pendu, à l’âge de 40 ans, en sacrifice aux dieux.

On sait même ce qu’a été le dernier repas de « l’homme de Tollund » : une bouillie de légumes, de lin oléagineux, de graines de sésame et de renouée. Le fait que certains de ces ingrédients n’étaient pas aisément disponibles en ce lieu à cette époque semble accréditer la thèse d’une mise à mort rituelle. Une hypothèse confortée par la présence de nombreuses autres dépouilles d’êtres humains et d’animaux dans ces tourbières.

Comment pouvons-nous protéger les tourbières?

La tourbe s’élabore à raison d’environ 5 cm par siècle. La tourbe n’est donc pas renouvelable à l’échelle humaine. On veillera donc de ne pas utiliser de tourbe dans son jardin ou de terreau mélangé à la tourbe. Il existe des substituts (paille de chanvre, de lin, coques de cacao…) qui remplissent la même fonction.

Des gestes malheureux à proscrire.

En avril 2017, une étincelle, attisée par une forte bise, était à l’origine de l’incendie d’une des plus belles tourbières du plateau : la tourbière des Grands Feings. Au-delà de la végétation, qui s’en remettra, combien d‘insectes, reptiles, batraciens et petits mammifères ont été surpris par les flammes ? Il est d’évidence qu’à la sortie de l’hiver après une période de beau soleil, les fougères, laiches et autres graminées de l’année précédente représentent un substrat des plus inflammables. Il suffit d’un mégot de cigarette, jeté de manière désinvolte pour détruire des hectares d’un milieu rare et précieux.